Récollection de Carême du séminaire

Avec Madeleine Delbrêl, « rendre l’Église aimable et aimante »

Les 17 et 18 février derniers, l’ensemble du séminaire du Studium était réuni pour un temps de recollection, à l’occasion de l’entrée dans le Carême. Le père Gilles François, postulateur de la cause de béatification de Madeleine Delbrêl, proposait à cette occasion quelques pistes de méditation et de réflexion autour de cette figure à la fois atypique et inspirante du catholicisme social de l’histoire récente. Accueillis chez les moniales dominicaines de Taulignan, retirées dans le calme de la Drôme provençale,  la qualité du silence et la beauté du chant dans la liturgie  contribuent  à un climat propice au ressourcement en Dieu.

Madeleine Delbrêl fut à la fois poétesse, assistante sociale et mystique française du XXe siècle. De sa spiritualité, on peut retenir, entre autres, sa forte conscience de la sainteté dans l’ordinaire du quotidien : « Nous autres gens de la rue, croyons de toutes nos forces, que cette rue, que ce monde où Dieu nous a mis est pour nous le lieu de notre sainteté. Nous croyons que rien de nécessaire ne nous y manque, car si ce nécessaire nous manquait, Dieu nous l’aurait déjà donné ».

L’originalité de l’intuition de Madeleine Delbrêl se manifeste dès les années 1930, dans son désir de vivre une double vocation : celle à une vie consacrée à Dieu, tout un étant pleinement engagé dans le monde. En mission à Évry, alors capitale du communisme et de l’athéisme militant, elle affirme qu’ « ils [les communistes] ont droit à nous [les catholiques] ». La charité fraternelle qui anime le cœur de Madeleine se manifeste dans sa proximité avec les petites gens du quotidien. Elle souhaite aller aux périphéries pour y apporter la lumière de l’amour du Christ.

Pour Madeleine, sa mission quotidienne ne saurait toutefois se vivre en dehors de la communion avec l’Eglise. Elle affirme en effet qu’il est impossible « d’incarner la charité de Dieu dans le monde » sans accepter d’abord « l’incarnation de cette charité dans l’Église, dans le Corps mystique de Jésus-Christ ». Le Christ et l’Église sont inséparables, aussi c’est dans l’Église que circule la vie du Christ, c’est par elle que se communique la charité du Christ. Dès lors « de cet amour du Christ qui est dans l’Église et qui est méconnu ou haï, il faudrait avoir la compassion ». Le chrétien doit « s’acharner à rendre l’Église aimable et aimante. » Madeleine ajoute en ce sens : « On ne peut vivre cet amour qui est à la taille du Christ-Église et non à la nôtre, que si nous intensifions notre appartenance intime, interne, vitale au Christ dans l’Église ». Ainsi, par Dieu, nous pourrons surmonter la peur par l’amour et « avoir le courage de laisser transpercer l’écorce de nos vies, et leur sève, et leur moelle, par le bourgeon de charité qui constitue notre appel ».

C’est donc vers une vocation à l’amour que Madeleine a orienté nos regards au temps du Carême, nous rappelant ainsi que « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. » (Jn 3,16)

Matthieu Laumonier - Séminariste en année de synthèse vocationnelle - appelé au diaconat